Ah Ah ! De la variété française sur le site de Clyzenn !... Encore des goths qui craquent le vernis !... Mais non, mais non, c'est juste histoire de faire grincer quelques dents. Car le cas de la plus célèbre Québécoise de France divise le milieu gothique en deux catégories : ceux qui ne veulent pas en entendre parler et ceux qui refusent d'avouer qu'ils aiment ça !
La sortie bassement mercantile et totalement putassière de ce best of nous donne l'occasion d'aborder le sujet. Car Mylène Farmer, sans être gothique, a longtemps été pour les gens de notre génération (les 25-35 comme on dit chez Ipsos) le premier contact avec les Ténèbres du Dedans, c'est-à-dire le Spleen comme le décrivait Baudelaire entre deux bouteilles (ce même Baudelaire dont elle met en musique "L'Horloge" avec maestria en 1988). Et plus encore que sa musique, quasi-intégralement écrite par son Pygmalion et compagnon Laurent Boutonnat, ce sont ses clips, véritables courts-métrages sensuels et romantiques, eux-aussi signés Boutonnat, qui ont marqué nos imaginations fébriles d'adolescents tourmentés. De "Libertine" à "Les Mots", en passant par les inquiétants "Plus Grandir" et "Je te rends ton amour", on peut constater qu'en dépit de nombreuses et racoleuses digressions (dont l'album d'Alizée), Laurent et Mylène n'abandonnent jamais complètement ce mal-être pourtant peu vendeur qui n'est jamais totalement absent de chacune de leurs oeuvres.
Cette troublante continuité, rare dans le domaine de la chanson et bien peu fédérateur auprès du grand public, me pousse à un certain respect pour ce couple somme toute discret, peu expressif, qui fuit les mondanités et les succès faciles (N'oublions pas que la chanteuse refuse catégoriquement et inexplicablement l'existence officielle d'un quelconque fan-club ou site web officiel). Mylène aux mille visages, tous vrais, tous illusoires... Laurent dans l'ombre, invisible, tirant certainement la plupart des ficelles, comme on a pu le voir dans son superbe film "Giorgino", sorti en 1994, chef d'œuvre absolu et intemporel, dans lequel il a tenté, sans succès hélas, d'exister par lui-même.
On attendait de ce best of, le premier en 18 ans de carrière, une sélection plus personnelle des titres de Mylène. Hélas, comme l'annonce la pochette, entre glamour vulgaire et kitsch "tendance", il s'agit moins d'un bilan que de quoi payer les futures layettes de la progéniture de Mylène. On aurait pourtant bien aimé retrouver quelques beaux titres comme "Allan", "Eaunanisme", "L'Horloge", "Agnus Dei", "Et si vieillir m'était conté"... mais le profane ne trouvera ici que l'interminable liste des singles, agrémentée d'inédits peu motivants (dont l'infâme et alizéen "C'est une belle journée", probablement le pire étron que le couple ait jamais produit). Le seul avantage de ces "Mots" est de permettre de retrouver les chansons de Mylène en remasterisé 24 bits, dont les singles isolés "A quoi je sers ?", "Que mon cœur lâche" et "L'Histoire d'une Fée, c'est...", excessivement côtés chez les disquaires, ainsi que la version remixée et allongée de "Maman a tort" qui ouvre le premier disque et redonne une deuxième vie au morceau. A noter aussi que certains titres comme "Libertine" ou "Plus Grandir" ont été rechantés par Mylène, ce qui est aussi disgracieux que blasphématoire pour n'importe quel fan de base. Bref, autant réécouter les vieux albums en attendant leur remastérisation. Et encore... Si on se repassait juste les clips... Sans le son...
Mario